Livre APNET – Vaccin Covid-19 : développement et validation

Un livre de Marie Lachâtre(1), Liem Binh Luong(1), Jean Paul Viard(2,3), Odile Launay(1,3,4)

1 Centre d’Investigation clinique CIC 1417, Hôpital Cochin/APHP, Paris, France. 

2 Unité d’Immuno-infectiologie, Centre de Diagnostic et de Thérapeutique, Hôpital Hôtel-Dieu/APHP, Paris, France

3 Université de Paris ; Faculte de medecine Paris Descartes, Paris, France

4 Inserm ; F-CRIN ; I-REIVAC ; COVIREIVAC

Coordonnées des auteurs :

  • Dr Marie Lachâtre
    Centre d’Investigation clinique CIC 1417
    Hôpital Cochin/APHP 27, rue du Fbg St Jacques 75679 – Paris cedex 14
    marie.lachatre@aphp.fr
    Tel : 01.58.41.28.60
  • Dr Liem Binh Luong
    Centre d’Investigation clinique CIC 1417
    Hôpital Cochin/APHP 27, rue du Fbg St Jacques 75679 – Paris cedex 14
    liem.luong@aphp.fr
    Tel : 01.58.41.28.60
  • Pr Jean-Paul Viard
    Unité d’Immuno-infectiologie, Centre de Diagnostic et de Thérapeutique
    Hôpital Hôtel-Dieu/APHP, 1 Place du Parvis Notre-Dame, 75181 Paris cedex 04
    jean-paul.viard@aphp.fr
    Tél : 01.42.34.88.36
  • Pr Odile Launay
    Centre d’Investigation clinique CIC 1417
    Hôpital Cochin/APHP 27, rue du Fbg St Jacques 75679 – Paris cedex 14
    odile.launay@aphp.fr
    Tel : 01.58.41.27.41

L’évolution à moyen et long termes de l’épidémie de COVID-19 est aujourd’hui peu prévisible. En l’absence de traitement efficace, la mise au point d’un vaccin préventif est un enjeu majeur de santé publique à l’échelle mondiale. Pour comprendre les stratégies mises en œuvre pour cela, il est utile de revenir sur les connaissances antérieurement acquises sur l’immunité – notamment humorale et en particulier les anticorps neutralisants – contre les coronavirus humains (HCoV) antérieurement identifiés (1) et sur les données actuellement disponibles concernant l’immunité contre le SARS-CoV-2 lui-même (2). 

La réponse immune aux coronavirus associe l’immunité innée et l’immunité adaptative cellulaire et humorale. En conséquence, si la réponse humorale est la plus facile à étudier, elle ne saurait résumer le sujet. Il faut également bien prendre garde à ne pas sur-interpréter les résultats des études sérologiques : à ce jour les tests sérologiques ont été encore peu évalués, le choix optimal de leur cible antigénique (nucléocapside et/ou protéine de «spike»), leur seuil de positivité, leur spécificité et sensibilité (ou valeurs prédictives positive et négative) et le caractère neutralisant (protecteur) ou non des anticorps dépistés restent des points à approfondir. Enfin, dans plusieurs infections virales (en tout premier lieu la dengue, mais aussi le SRAS …), des anticorps facilitants ont été décrits.

Il apparaît aussi que les formes graves d’infections à coronavirus relèvent de l’immunopathologie viro-induite (3), sous la forme d’une réponse inflammatoire excessive, non contrôlée, aboutissant à des lésions d’organes sévères. Les déterminants de l’orientation de la réponse immune vers uns syndrome inflammatoire délétère ou vers un contrôle efficace de l’infection restent à déterminer.


1. Immunité anti-coronavirus : corrélats du contrôle de l’infection

1.1 Coronavirus des rhumes

Plusieurs HCoV sont impliqués, à côté des rhinovirus, dans la survenue des rhumes, en cause d’en 20 % de ces syndromes. Quatre d’entre eux ont été bien étudiés : HCoV 229E, NL63, OC43 et HKU1. Les virus OC43 et HKU1 sont des bêta-coronavirus, comme les SARS-CoV-1 et 2 et le MERS-CoV. Leur séroprévalence est très élevée en population générale (de 60 à plus de 90 %) mais la protection conférée par les anticorps semble limitée à environ 2 ans : ce qui est compatible avec les données épidémiologiques, montrant par exemple la résurgence régulière des épidémies de rhume à HCoV OC43 tous les 2 ou 3 ans aux Etats-Unis.

Des expériences d’inoculation des virus OC43 et 229E à des volontaires sains confirment que des anticorps neutralisants (et donc protecteurs) apparaissent environ 1 semaine après l’infection, atteignent un pic vers la 2e semaine, puis diminuent et à 1 an. Les anticorps sont en général présents à un taux faible, qui ne suffit plus à protéger contre une nouvelle infection.

1.2 Le SRAS (infection à SARS-CoV-1) et l’infection à MERS-CoV

Maladie grave, due au SARS-CoV-1, un proche parent du SARS-CoV-2, le « SRAS » est apparu en Chine en 2004 mais n’a pas atteint le stade de pandémie. La cinétique des anticorps anti-SARS-CoV-1, telle que décrite dans des études chinoises totalisant plus de 350 personnes, apparaît très similaire à ce qui a été observées avec les HCoV des rhumes :  les IgG neutralisantes apparaissent en moyenne à la 2e semaine post-infection, atteignent leur taux maximum à 2 mois, puis diminuent avec une demi-vie d’environ 6 semaines pour disparaître à 2 ans. A 8 ans post-infection, on ne retrouvait plus de lymphocytes B mémoire spécifiques.

Le MERS-CoV est le coronavirus émergent responsable de la plus lourde mortalité (plus de 30 % contre un peu moins de 10 % pour le SRAS). Dans cette infection, les anticorps apparaissent aussi entre 2 et 3 semaines et semblent pouvoir persister pendant près de 3 ans.

Les modèles d’infection chez la souris (utilisation de souris immunodéficientes « SCID » et transfert de cellules T spécifiques) a permis de montrer que pour SARS-CoV-1 comme pour MERS-CoV, les cellules T sont indispensables à la clairance de l’infection virale et à l’amélioration de la survie des animaux infectés.

1.3 COVID-19 : infection par le SARS-CoV-2 

Dans une étude chinoise prospective, 173 patients hospitalisés pour une infection par le SARS-CoV-2 ont été inclus : 93,1 % d’entre eux ont séroconverti en technique ELISA (ciblant les anticorps reconnaissant le domaine de liaison au récepteur de la protéine de «spike »). En médiane, le délai de séroconversion a été de 11 jours pour les anticorps totaux et de respectivement 12 et 14 jours pour les IgM et IgG analysées séparément. Un mois après l’infection, 100 % des patients avaient séroconverti.

Une étude chez 7 patients infectés par le SARS-CoV-2 à Wuhan indique que la détection d’anticorps présentant une réactivité croisée avec la nucléocapside du SARS-CoV-1 (mais pas avec d’autres HCoV), et ces anticorps étaient capables de neutraliser le virus SARS-CoV-2 in vitro. Toutefois, il semble qu’une proportion significative de patients hospitalisés (voire, dans une étude, la majorité d’entre eux) guérissent de l’infection à SARS-CoV2 sans présenter de titres élevés d’anticorps neutralisants.

Une étude française (4) s’est intéressée à des formes moins sévères de COVID-19 : elle a recruté 160 personnels soignants du CHU de Strasbourg, dont l’infection a été prouvée par PCR mais qui n’avaient pas dû être hospitalisés. La recherche des anticorps (dirigés contre la protéine de « spike ») a été réalisée en médiane 24 jours après le début des symptômes : avec un test d’immunodiagnostic rapide les anticorps étaient détectés chez 95,6 % des individus alors qu’avec un test très sensible en cytométrie de flux la proportion était de 99.4 % (un seul résultat négatif). Des anticorps neutralisants (test in vitro utilisant des particules lentivirales pseudotypées portant la protéine S) étaient détectés chez 79 %, 92 % et 98 % des participants prélevés respectivement 13-20 jours, 21-27 jours et 28-41 jours après les premiers symptômes.

Des essais thérapeutiques préliminaires semblent par ailleurs montrer un effet clinique de la transfusion de plasma de personnes convalescentes, chez des personnes ayant une forme grave de COVID-19. Enfin, une étude expérimentale chez le macaque rhésus montre, sur 4 animaux, que l’infection par SARS-CoV-2 entraîne des signes respiratoires et généraux comparables à ce qui a été observé chez l’homme. Après guérison clinique et séroconversion, 2 animaux ont fait l’objet d’une tentative de réinfection par voie trachéale, mais sans succès. Ces résultats, qui doivent être confirmés, sont des arguments forts pour le caractère protecteur de l’immunité acquise lors de l’infection initiale.


2. Formes sévères d’infections à coronavirus : la « tempête cytokinique »

Des données convaincantes se sont accumulées au fil du temps pour mettre en avant le rôle d’une réponse inflammatoire non contrôlée dans les formes sévères d’infection à HCoV : SRAS, MERS et COVID-19. Schématiquement, la cascade de l’inflammation initiée par l’activation macrophagique, en particulier dans les poumons, avec la production dérégulée d’IL-6 et d’IL-1, est dans ces formes à l’origine d’un afflux de cellules, en particulier de polynucléaires, responsables des lésions alvéolaires, pouvant s’associer à une activation de la coagulation et à des complications thromboemboliques. Ces constatations sont à l’origine d’études thérapeutiques visant à inhiber l’action de cytokines pro-inflammatoires. 

On peut probablement rapprocher de ces formes la description, chez l’enfant, d’un syndrome apparenté à la maladie de Kawasaki, volontiers décalé dans le temps par rapport à l’infection virale aiguë, se traduisant par une forte fièvre, une inflammation systémique surproduction de cytokines pro-inflammatoires, avec au maximum un syndrome d’activation macrophagique et, inconstamment, une dilatation des artères coronaires.


3. Vaccins et SARS-CoV-2

Aucun vaccin dirigé contre un coronavirus n’est actuellement disponible chez l’Homme : le développement de vaccins contre le SARS-CoV-1 en 2003 et le MERS-CoV en 2007 ayant été interrompus pour la plupart des candidats vaccins dès le stade préclinique. Six mois après l’identification du SARS-CoV-2, 160 candidats vaccins recensés par l’OMS sont en cours de développement dans le monde par des équipes de recherche académiques et/ou industrielles (5) : plus de 130 sont en phase préclinique, 20 font l’objet d’essais chez l’homme (Tableau 1). L’urgence sanitaire explique une évaluation accélérée inédite et plusieurs essais de phase 3 pour évaluer leur efficacité ont démarré en juillet 2020.

3.1 Développement vaccinal clinique

Le développement clinique d’un nouveau vaccin repose sur la mise en place d’études cliniques séquentielles pour documenter la sécurité, l’efficacité et les conditions d’administration en vue d’un enregistrement par les autorités règlementaires. La première administration chez l’homme se fait au cours d’études de phase 1 avec en général une phase d’escalade de doses qui permet aussi le cas échéant le choix de l’adjuvant le plus adapté. La phase 2 permet de préciser les meilleurs schéma d’administration et dose en terme de réponse immunitaire pour ensuite évaluer l’efficacité clinique du vaccin dans l’étude pivot de phase 3, puis son enregistrement. Lorsque le corrélat de protection n’est pas connu ou que la circulation de l’agent infectieux peu élevée, des études de phase 2B sont proposées dans des populations plus exposées ou des études de challenge humain (non autorisées en France). Ces dernières peuvent être mises en place dans des conditions particulières (6). La durée moyenne d’un développement vaccinal est de l’ordre de 10 années.

3.2 Vaccins contre le SARS-CoV-2 : actualités

Les vaccins COVID19 doivent permettre d’assurer en premier lieu la protection des personnes à haut risque d’infection COVID-19 (professionnels de santé en particulier) et les personnes à risque de formes graves (sujets âgés, obèses, personnes ayant des pathologies cardiaques et pulmonaires, diabétiques… ). Leur production en grande quantité est indispensable pour assurer la protection dans le monde. Enfin, malgré un développement accéléré en réponse à l’urgence sanitaire, l’évaluation soigneuse de leur sécurité est prioritaire. Plus spécifiquement, le risque d’induction d’anticorps facilitant doit être pris en compte.

Les principaux candidats vaccins dirigés contre le SARS-CoV-2 sont de 4 types : les vaccins viraux (vivants atténués ou inactivés), les vaccins à acides nucléiques (ADN ou ARN), les vaccins à vecteurs viraux (réplicatifs ou non), et les vaccins protéiques (sous-unités protéiques ou pseudo particules virales). 

3.2.1 Les vaccins viraux

3.2.1.1 Les vaccins viraux vivants atténués

Les vaccins viraux vivants atténués sont obtenus le plus souvent par la culture de l’agent infectieux dans des conditions sous-optimales ou par cultures successives afin d’atténuer leur virulence tout en conservant leur immunogénicité. Leur avantage majeur est de déclencher une réponse immunitaire efficace et durable. Il persiste néanmoins un risque infectieux, les contre-indiquant chez les patients immunodéprimés et les femmes enceintes. Aucun vaccin dirigé contre le SARS-CoV-2 de ce type n’est actuellement à l’essai chez l’Homme. 

3.2.1.2 Les vaccins viraux inactivés

Les vaccins viraux inactivés sont obtenus à partir de micro-organismes entiers, tués par la chaleur ou des traitements chimiques. Ils ne présentent aucun risque infectieux, mais sont souvent responsables de réactions locorégionales et/ou générales (fièvre, douleurs musculo-squelettiques). Ils requièrent l’utilisation d’un adjuvant pour augmenter leur immunogénicité. A l’heure actuelle, 4 candidats vaccins chinois de ce type dirigés contre le SARS-CoV-2 sont en essais cliniques : 2 candidats vaccins développés respectivement par le Wuhan Institute of Biological Products et par le Beijing Institute of Biological Products en collaboration avec le laboratoire pharmaceutique Sinopharm (Chine), 1 candidat vaccin développé par le Institute of Medical Biology et la Chinese Academy of Medical Sciences et 1 candidat-vaccin PiCoVacc® développé par la société de biotechnologie Sinovac (Chine). Ce dernier a démontré son efficacité en cas de challenge et sa bonne tolérance chez les primates non humains (7). Un essai de phase 3 a démarré en juillet au Brésil. 

3.2.2 Les vaccins à acides nucléiques

3.2.2.1 Les vaccins à ADN

Les vaccins à ADN sont composés d’un plasmide purifié d’ADN contenant une séquence codant pour un antigène donné. Après administration du vaccin, l’antigène est exprimé par les cellules transfectées induisant une réponse immunitaire spécifique et mesurable. L’efficacité et la sécurité de ces vaccins a été démontré sur de nombreux modèles animaux. Cette technologie, développée au débuts des années 90, n’a pas à ce jour permis d’obtenir des résultats probants chez l’Homme lors d’essais de phases 1 et 2 portant sur les infections virales (VIH, VHB, VHC, HSV), la tuberculose ou le paludisme. Cette nouvelle approche de vaccination suscite cependant des espoirs importants par son faible coût de fabrication et de sa stabilité à température ambiante. 

Le candidat vaccin INO-4800 dirigé contre le SARS-CoV-2 et développé par la société de biotechnologie Inovio Pharmaceuticals (États-Unis) est actuellement en essais de phase 1et 1/2 aux États-Unis. Il est composé d’un plasmide d’ADN codant pour la protéine S de surface du virus (protéine Spike). Les essais précliniques ont montré une réponse immunitaire satisfaisante chez l’animal. Deux autres candidats vaccins de ce type développés respectivement par la société de biotechnologie Genexine Consortium (Corée du Sud) et par Osaka University (Japon) en collaboration avec la société de biotechnologie AnGes (Japon) et le laboratoire pharmaceutique Takara Bio (États-Unis) viennent de débuter des essais de phase 1/2. 

3.2.2.2 Les vaccins à ARN

Les vaccins à ARN sont composés d’ARNm codant pour un antigène donné. L’ARNm est administré le plus souvent enveloppé par une couche lipidique facilitant son entrée dans la cellule. Ces vaccins représentent une alternative prometteuse aux approches vaccinales conventionnelles en raison de leurs cycles courts de production, de leur faible coût de fabrication et de leur sécurité (aucun risque infectieux ni risque de survenue de mutagénèse insertionnelle). Développée au début des années 90, cette nouvelle technologie vaccinale a obtenu des résultats encourageants sur les modèles animaux notamment pour les infections à VIH, à virus grippal et à virus Zika. Aucune étude à ce jour n’a démontré de résultats satisfaisants lors d’essai clinique chez l’Homme. 

Quatre candidats vaccins de ce type dirigés contre le SARS-CoV-2 sont actuellement en essai clinique de phase 1/2. Le candidat vaccin, ARNm-1273, développé par la société de biotechnologie Moderna Therapeutics (États-Unis) en collaboration avec le National Institute of Allergy and Infectious Diseases (NIAID) est actuellement évalué en phases 1 et 2 aux États-Unis (8). Le candidat vaccin, BNT162, développé par la société de biotechnologie BioNTech (Allemagne) en collaboration avec les laboratoires pharmaceutiques Pfizer (États-Unis) et Fosun Pharma (Chine) est actuellement évalué en phase 1/2 aux États-Unis. Le candidat vaccin, LNP-nCoVsaRNA,  développé par l’Imperial College London est à l’essai en phase 1 au Royaume-Uni. Enfin, le candidat vaccin, développé par la société de biotechnologie Curevac (Allemagne) débutera prochainement une phase 1.

3.2.3 Les vaccins à vecteurs viraux

Les vaccins à vecteurs viraux utilisent une souche virale génétiquement modifiée (souche vaccinale de la rougeole, adénovirus du chimpanzé par exemple) afin de produire les protéines du virus cible dans l’organisme. Ils sont globalement très immunogènes et sûrs à l’exception des vaccins VIH qui présentent un risque accru de contamination. L’immunité préexistante contre le vecteur peut cependant affaiblir l’efficacité du vaccin.

3.2.3.1 Les vaccins à vecteurs viraux réplicatifs 

Les seuls vaccins vectorisés ayant obtenu une autorisation de mise sur le marche sont dirigés contre le virus Ebola : i) rVSV-ZEBOV-GP, issu du virus de la stomatite vésiculaire (VSV), produit par le laboratoire pharmaceutique Merck (États-Unis), et ii) Ad26.ZEBOV/MVA-BN, issu de l’adénovirus type 26, produit par le laboratoire pharmaceutique Johnson&Johnson (États-Unis). Recommandés par l’OMS, ils sont actuellement administrés en République Démocratique du Congo pour contrer l’épidémie de maladie à virus Ebola qui sévit depuis 2018. Des candidats vaccins de ce type, dirigés contre le SARS-CoV-1 et le MERS-CoV, exprimant la protéine S se sont avérés efficace chez la souris. 

Un candidat vaccin, reposant sur un vecteur rougeole ciblant la protéine S du SARS-CoV-2 est en cours de développement par l’Institut Pasteur (France) en collaboration avec l’Université de Pittsburg (États-Unis) et la société de biotechnologie Themis (Autriche), désormais filiale du laboratoire pharmaceutique MSD (États-Unis). Ce candidat vaccin sera évalué en phase 1/2 dès août 2020 dans un essai randomisé, placebo-contrôle, bicentrique (Paris, France et Anvers, Belgique).

3.2.3.2 Les vaccins à vecteurs viraux non réplicatifs 

Deux candidats vaccins de ce type dirigés contre le SARS-CoV-2 sont actuellement en essai clinique. Le premier développé par la société de biotechnologie CanSino Biological (Chine) et le Beijing Institute of Biotechnology (Chine) repose sur un vecteur adénovirus de type 5 ciblant la protéine S (9). Il est actuellement évalué en 2 en Chine et au Canada. Le deuxième candidat vaccin, ChAdOx1 nCoV-19, développé par le laboratoire pharmaceutique AstraZeneca (Royaume-Uni, Suède) en collaboration avec l’Université d’Oxford (Royaume-Uni) et le Serum Institute of India (Inde) repose sur un vecteur adénovirus du chimpnazé, ChAdOx1-S. Il est actuellement évalué en phases 1/2 et 2b/3 au Royaume-Uni, et en phase 3 au Brésil et en Afrique du Sug. Le troisième candidat vaccin, Gam-COVID-Vac, développé par le Gamaleya Research Institute (Russie) repose également sur un vecteur adénovirus. Il est actuellement évalué en phase 1 et 2 en Russie.

3.2.4 Les vaccins basés sur des protéines

3.2.4.1 Les vaccins à sous-unités protéiques

Plusieurs équipes développent ce type de vaccin en utilisant la protéine S du virus ou sur son domaine RBD. Des vaccins similaires dirigés contre le virus du SARS-CoV-1 avaient donné des résultats satisfaisants en terme d’immunogénicité chez le primate non humain. Ces vaccins nécessitent la présence d’un adjuvant et plusieurs doses pour être immunogène.

Un candidat vaccin développé par la société de biotechnologie Novavax (États-Unis) est actuellement évalué en phase 1/2 en Australie. Un candidat vaccin développé par les laboratoires pharmaceutiques Sanofi Pasteur (France) et GSK (Royaume-Uni) basé sur une protéine recombinante avec adjuvant lipidique est actuellement en phase préclinique.

3.2.4.2 Les vaccins à particules de type virus

Les vaccins à particules de type virus sont composés de coquilles de virus vides imitant la structure du virus. Ils ne sont pas infectieux (absence de matériel génétique) mais peuvent déclencher une forte réponse immunitaire. Ils restent cependant difficiles à produire. Plusieurs de ces vaccins sont en phase préclinique, notamment le candidat vaccin, OVX-CoV, développé par la société de biotechnologie Osivax (France). Aucun n’est à l’essai chez l’Homme actuellement.

3.3 Les challenges humains pourraient-ils permettre une évaluation plus rapide des candidats vaccins ?

La pandémie COVID-19 nécessite le développement et la validation rapide de vaccins efficaces. La courbe épidémique des infections émergentes conditionne le développement de ces vaccins, souvent interrompu en phase préclinique. Face à cette situation, la mise en place de challenges humains a été discutée. Ils consistent à infecter intentionnellement des volontaires sains dans des conditions expérimentales d’inoculation et de surveillance strictes. Ils requièrent un certain niveau de connaissance vis-à-vis de la mortalité/morbidité de la maladie, de son mode de transmission et de son impact épidémiologique. Ils visent à améliorer les connaissances physiopathologiques de la maladie (les charges virales ou les corrélats de protection en particulier), et à évaluer notamment l’efficacité d’un candidat vaccin. Ils sont moins coûteux en temps et en ressource que les essais cliniques classiques, et permettent de maitriser au mieux les conditions d’infections. Cependant, les challenges humains se heurtent à des problématiques importantes : i) la balance bénéfices/risque pour le participant : évaluation du risque de survenue d’un évènement indésirable grave, du bénéfice d’une prise en charge précoce en cas de survenue de la maladie, estimation de la hauteur de la rémunération etc… ii) la balance bénéfice/risque pour la collectivité : évaluation du risque de transmission secondaire, estimation des bénéfices attendus en regard des enjeux de santé publique etc…Il reste ainsi la question essentielle du caractère éthique ou non de ces challenges humains et des choix sociétaux qui en découlent.

3.4 Vaccins contre le SARS-CoV-2 : hésitation vaccinale

Une fois les obstacles de la mise au point d’un vaccin efficace et de sa production en masse surmontées, l’acceptation vaccinale est cruciale pour permettre une immunité de groupe. Alors que l’hésitation vaccinale en France est l’une de plus forte au monde, l’étude Coconel, une étude longitudinale en ligne réalisé sur un panel d’un millier de personnes représentatives de la population française, retrouve 26% de refus à la vaccination. Ce refus est plus important chez les 26-35 ans (39 % d’entre eux déclarent refuser un vaccin), mais il atteint 18 % des 66-75 ans et 22 % des plus de 75 ans refuseraient le vaccin.

En conclusion, la mise au point d’un vaccin efficace contre le SARS-CoV-2 reste la piste la plus crédible pour espérer lutter contre l’épidémie de COVID-19. De ce fait, la mise au point de candidats vaccins et des développements cliniques ont été d’une rapidité sans précédent. Ces efforts importants donnent l’espoir raisonnable d’un vaccin à moyen terme, mais des questions importantes comme la production en masse et l’adhésion vaccinale restent en suspens. 


Bibliographie

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